Rencontre avec Antoine, cofondateur de Philémon 1889, une marque de cosmétiques pour hommes made in France et éco responsable.

Diplômé en Gestion administrative et commerciale, Antoine Fagot est le créateur de la marque de produits cosmétiques masculins Philémon 1889. À travers une gamme de soins allant du gel douche à la mousse à raser, ce barbu de 26 ans s’est donné pour missions de décomplexer les hommes du rituel beauté, trop souvent pensé pour les femmes.

La marque au nom rétro et au packaging léché est 100% made in France, branchée et éco responsable.

Alors que « qualité » et « autodérision » sont les maîtres-mots de Philémon, Antoine a développé pendant près d’un an une dizaine de produits en collaboration avec un artisan-barbier grenoblois et un laboratoire breton.

Antoine revient sur son parcours, sa marque, ses projets, sa vie de jeune entrepreneur et son admiration pour Jack White !

Philémon 1889, c’est quoi exactement ?

Philémon 1889 est la 1re marque cosmétique premium, complice du soin quotidien de l’homme, 100% made in France. La société a été créée en juin 2015 et Philémon a commencé sa commercialisation en décembre.

Comment l’idée et l’envie de créer ton entreprise sont-elles venues ?

Tout est parti d’un projet scolaire. Nous avions pour consigne le développement d’un projet qui intégrait la création d’un site web marchand.

Fortement barbu, et en recherche de produits de soin adaptés à ma pilosité, les quelques marques présentes sur le territoire ne correspondaient pas à mon univers ou à mes attentes techniques.

Forcé de commander des produits à l’étranger, je payais bien souvent plus cher de frais de livraison que de produits cosmétiques. L’idée de base fut donc de créer une plateforme en ligne de revente de produits cosmétiques sélectionnés et importés.

“Nous partageons une conviction, celle de participer à l’effort national en matière de création et sauvegarde de l’emploi”.

Comment es-tu passé d’un projet étudiant à la création d’entreprise ?

Sur la partie législative du projet, j’ai décidé de consulter un avocat à qui j’ai exposé le projet dans son intégralité. Attentif à la réalisation d’un projet pertinent, il m’a posé une question de taille, sans laquelle Philémon n’aurait surement jamais vu le jour : « Pourquoi ne pas monter en vrai ce projet ? » Question à laquelle j’ai répondu : « Et avec quels moyens ? ». Je ne pouvais pas assumer seul un tel projet.

Quelques mois plus tard, cet avocat m’a rappelé en m’annonçant avoir discuté du projet à ses clients. Parmi eux, un certain Jean-Luc Courtial (aujourd’hui cofondateur de Philémon) souhaitait me rencontrer pour que je lui présente le projet en détail. Quinze minutes ont suffi pour convaincre cet ancien directeur de l’industrie médicale à me suivre dans l’aventure.

Jean-Luc et moi partageons une conviction, celle de participer à l’effort national en matière de création et sauvegarde de l’emploi.

Salon international de la coiffure

Salon international de la coiffure

Est-il difficile de vendre de la cosmétique aux hommes ?

Le domaine du cosmétique pour homme souffre encore d’une image féminine parfois difficile à assumer. L’univers de marque, la nomenclature des produits et le design que nous avons créés dédramatisent le parcours de soin par l’humour et l’autodérision.

Pourquoi ce nom ?

Nous ne souhaitions pas présenter un nom à consonance anglo-saxonne pour une marque cosmétique 100% made in France. Dans l’esprit de Jean-Luc, un nom a soudainement resurgi, celui de son grand-père.

Dans une valise au grenier de sa maison, nous avons retrouvé des papiers d’état civil jaunis, un miroir barbier, des bretelles, de vieux coupe-chous, du savon à raser encore moussant… autant d’objets retraçant le parcours de soin d’un homme né 100 ans avant ma naissance. Un arrière-grand-père est entré dans ma vie.

Par ailleurs, alors que 1889 est l’année de naissance de Philémon, il s’agit également de l’année de l’exposition universelle de Paris et de la construction de la tour Eiffel, symbole international du made in France !

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Antoine Fagot et Jean-Luc Courtial

Quelles sont vos inspirations et vos influences ?

1083 et Le Slip français pour avoir su faire du made in France une belle réussite entrepreneuriale.

Steve Job pour avoir pensé blanc quand tout le monde pensait noir et pour avoir révolutionné son secteur d’activité en étant en rupture totale avec le marché.

Et Jack White : guitariste à mes heures perdues, il est pour moi l’un des meilleurs de tous les temps… Surtout, il incarne dans la musique toutes les exigences de l’entrepreneur idéal. Touche à tout, virtuose (guitariste, batteur, pianiste, chanteur), visionnaire, communicant, et perfectionniste, avide de nouveauté !

“Sur l’ensemble des maillons de la chaîne, nous avons maximisé l’effort environnemental”.

Comment s’est déroulée l’étape de recherche et développement du projet ?

Au début de l’aventure, nous étions deux ‘’messieurs Tout-le-Monde’’ avec nos habitudes de consommation, notre différence d’âge, nos préférences à l’usage des produits, nos ignorances en termes de formulations et techniques d’utilisation… Assimilés au consommateur final, nous étions plus à même de comprendre ses besoins.

Pour pallier notre manque d’expertise et afin de connaître les rouages de la profession, nous nous sommes rapprochés d’un public averti. Pendant plus de 18 mois, Philémon a ainsi mis en symbiose les trois entités fondatrices de la marque :

• Nous avons enquêté auprès de coiffeurs, barbiers et autres professionnels du soin masculin. Ils nous ont fait part des besoins qu’ils rencontrent au quotidien. Puis nous leur avons soumis les produits de la marque et obtenu des retours précis afin d’établir une gamme ‘’idéale’’.

• Grâce à des enquêtes de terrain auprès de clients finaux, nous avons pu cerner leurs besoins en tant que consommateur, ainsi que leur ressenti vis-à-vis des produits développés et de leurs caractéristiques : prix, contenance, texture, couleur, parfum…

• Enfin, nous avons collaboré avec un laboratoire cosmétique en charge de la formulation, de la production et du conditionnement des produits dans le respect des normes cosmétiques BPF ISO 22716 (Bonnes Pratiques de Fabrication) dans le but de garantir la traçabilité complète des produits : de la matière première au produit fini.

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En quoi Philémon 1889 est-elle une marque “éthique” ?

Sur l’ensemble des maillons de la chaîne, nous avons maximisé l’effort environnemental. Cela implique de travailler avec des acteurs du territoire national afin de limiter l’émission de CO2 en minimisant le transport des marchandises.

Cela se traduit également par une création intelligente des packagings, le choix des matières premières recyclées et recyclables l’utilisation d’encres vertes, la recherche de formulations aux actifs naturels.

Être éthique, c’est également s’appuyer sur l’innovation pour développer des produits multi-soins pour la peau et les poils afin de ne pas multiplier les produits sur l’étagère de la salle de bains.

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Avec qui travaillez-vous ?

Nous sommes deux créateurs indépendants adossés à une soixantaine de partenaires : laboratoire cosmétique, artisans, imprimeurs, industriels, professionnels barbiers, coiffeurs, dépositaires, comptables, avocats… répartis exclusivement sur le territoire national.

“On s’imagine souvent qu’un entrepreneur est un mec débordé […] Eh bien, c’est un peu ça la vie d’un jeune entrepreneur !”

Financièrement, comment as-tu réussi à créer ton entreprise ?

Pendant les 18 mois de création du projet, j’exerçais en tant que chargé de projet de communication en entreprise et en agence. Jusqu’à maturité, le projet a donc évolué principalement la nuit et les week-ends, relayé la journée par mon associé.

Philémon s’est autofinancé à hauteur de 75k€, complété d’un concours bancaire de 30k€. Pour boucler le montage financier, lancer la production et avoir un premier retour marché, 19% des besoins sont passés par le financement participatif. 25 000€ ont été ainsi collectés auprès des professionnels et particuliers, sous forme de précommandes, sur la plateforme Ulule.

À quoi ressemble la vie d’un jeune entrepreneur ?

On s’imagine souvent qu’un entrepreneur est un mec débordé, toujours l’esprit au travail, qui raisonne en fonction de son projet, pour qui les week-ends et les repas de famille sont impossibles, et qui passe son temps au téléphone ou en rendez-vous… Eh bien, c’est un peu ça la vie d’un jeune entrepreneur !

Mais c’est aussi un mec qui se lève tous les jours à 6h avec le sourire parce qu’il s’éclate à donner vie à son propre projet. Il faut être déterminé au quotidien pour faire en sorte qu’une problématique devienne une opportunité. Ce sont aussi des rencontres et des regards neufs sur le projet, la satisfaction de voir ses produits en vitrine, les encouragements et les retours positifs des clients, le plaisir de se réinventer chaque jour, la possibilité d’être créatif, ou encore le régal d’être contacté par des médias nationaux…

Quels sont les objectifs sur le long terme avec Philémon 1889 ?

Dans un premier temps, l’objectif de Philémon est accroître sa notoriété sur le territoire national pour devenir une marque incontournable du soin masculin, reconnue par la profession. Afin d’accélérer les ventes sur le territoire national, Philémon ajuste actuellement sa force de vente par le recrutement d’agents commerciaux.

À moyen terme, nos objectifs passent par la création d’emploi avec des postes administratifs, le recrutement d’un community manager et d’un responsable commercial. Nous souhaitons également l’élargir la gamme et l’exporter à l’étranger.

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En tournage

Quelles sont les difficultés rencontrées au quotidien ?

Apprendre à maîtriser mes émotions face au lot de bonnes et moins bonnes nouvelles est peut-être l’exercice le plus difficile. À 26 ans on me prend pour une buse : « tu n’as pas fait ceci ? », « tu n’as pas pensé à cela ? »… De nature enthousiaste et impatiente, la sagesse de Jean-Luc m’apporte beaucoup ! Il faut savoir prendre sur soi et avancer.

Si c’était à refaire, que ferais-tu autrement ?

Les quelques erreurs commises sont le passage obligé de tout jeune entrepreneur et restent pour moi la méthode la plus efficace pour avancer. On se retrouve dans un an ?

“À trop prendre de recul, on finit par abandonner ses idées. Il faut savoir se jeter à l’eau”.

Quel(s) conseil(s) pourriez-vous donner à quelqu’un souhaitant se lancer dans l’entrepreneuriat ?

Savoir s’entourer des bonnes personnes et s’assurer de pouvoir faire les sacrifices qu’engendre l’entrepreneuriat.

Réfléchir, ajuster, calculer, recalculer, réajuster… Cela fait partie de la création d’entreprise (et rassurera votre banquier).

On fait forcément des erreurs, mais c’est de celles-ci que naîtront les meilleures avancées pour le projet. À trop prendre de recul, on finit par abandonner ses idées. Il faut savoir se jeter à l’eau.

Une anecdote ?

Si les hommes sont connus pour utiliser en douce les produits de soin de Madame dans la salle de bain, nombreuse clientes témoignent utiliser Le “malpropre” sous la douche et le sérum en soin après-rasage ou épilation. Les habitudes seraient-elles en train de changer ? Je ne demande que ça…

Petit, que rêvais-tu de faire comme métier ?

Je n’avais pas forcément d’idée précise de mon futur métier… simplement ce goût d’apprendre constamment, d’être créatif, et toucher à tout.

Avec Philémon, je suis à la fois designer, photographe, rédacteur, responsable de la communication, commercial, formateur, développeur web, menuisier quand il faut créer un stand, directeur artistique quand il faut manager une équipe de tournage, responsable achat quand qu’il faut négocier des contrats, spécialiste juridique quand il faut prévoir les droits à l’image…

C’est la seule façon que j’ai trouvée pour faire de ma curiosité multidisciplinaire un métier.

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Antoine, enfant

Un rêve un peu fou ?

Symbole moderne et médiatisé du savoir-faire français, Jean Dujardin accepte de se prêter au jeu pour une future campagne Philémon ! What Else ?

Philémon 1889 en chiffres

50
Soumissions produits du laboratoire en test
2000
Cafés
2000
Kilomètres de course à pied pour évacuer

Site de Philémon 1889
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Crédits photo : Philémon 1889